La crise de la démocratie est au cœur des débats contemporains, notamment à travers l’analyse de la « déconnexion démocratique » décrite par Roberto Stefan Foa et Yacha Mounk dans leur article The Danger of Deconsolidation: The Democratic Disconnect publié dans Journal of Democracy (Vol. 27, No. 3, p. 5-17). Leur étude met en lumière un phénomène inquiétant : la montée d’un scepticisme croissant envers les institutions démocratiques dans les démocraties établies, en particulier parmi les jeunes générations.

Méthodologie et sources

Les auteurs ont fondé leur analyse sur les données longitudinales de la World Values Survey (WVS), un réseau mondial de chercheurs en sciences sociales qui étudie les mutations des valeurs dans près de 100 pays depuis 1981. Cette enquête repose sur un questionnaire administré à environ 400 000 personnes à travers huit vagues successives. La WVS est reconnue pour ses analyses culturelles et ses concepts innovants, tels que l’opposition entre « survie vs. expression de soi » ou « traditionnel vs. séculaire-rationnel » (1).

Foa et Mounk ont sélectionné quatre indicateurs clés pour mesurer la santé démocratique : le soutien des citoyens à la démocratie en général, leur soutien aux institutions démocratiques principales, leur désir d’utiliser les canaux d’expression démocratiques, et leur ouverture à des régimes alternatifs. Ils ont isolé la variable « cohorte générationnelle » pour analyser les différences d’attitudes selon l’âge, en se concentrant sur les démocraties établies des États-Unis et d’Europe.

Résultats : une fracture générationnelle

Les résultats révèlent une tendance préoccupante : les citoyens, et particulièrement les jeunes générations dites « Millennials », manifestent un scepticisme croissant envers la démocratie. Ces derniers sont plus critiques envers les leaders politiques, plus cyniques quant à la démocratie comme système, et plus ouverts à envisager des alternatives autoritaires. Ils montrent également moins d’estime pour les élections et les droits civiques, et sont plus souvent affectés par une forme d’« apathie politique ». Cette génération semble indifférente à l’idée même de vivre en démocratie et plus susceptible d’adhérer à des radicalismes politiques.

Un autre constat important est que le soutien aux alternatives autoritaires est corrélé à la richesse, ce qui nuance l’idée que le mécontentement serait uniquement le fait des classes défavorisées. Cette complexité souligne que la crise démocratique touche diverses couches sociales.

Les raisons d’inquiétude

Selon les auteurs, ce qui est particulièrement alarmant est la tendance de longue durée révélée par le sondage, ainsi que le caractère contre-intuitif de ces résultats. En effet, les démocraties établies, souvent perçues comme stables et solides, montrent des signes de « déconsolidation démocratique ». Cette déconsolidation se manifeste par plusieurs phénomènes :

• Le succès spectaculaire des candidats antisystème, qui remettent en cause les règles et les normes démocratiques.
• La violation des règles démocratiques informelles par les acteurs politiques eux-mêmes, ce qui fragilise la confiance des citoyens.
• L’élargissement du fossé entre la légitimité perçue de la démocratie et sa capacité réelle à résoudre les problèmes sociaux et économiques.

Ces éléments traduisent une crise profonde de la démocratie représentative, où la défiance des citoyens envers leurs institutions menace la stabilité politique.

Implications et réflexions

Cette analyse invite à réfléchir sur les causes de ce désenchantement démocratique. La montée de l’individualisme, la transformation des modes de communication, la crise économique et sociale, ainsi que la perception d’une élite politique déconnectée, sont autant de facteurs qui peuvent expliquer ce phénomène. Pour les auteurs, il est crucial de ne pas sous-estimer ces signaux, car ils annoncent une possible fragilisation des démocraties occidentales, qui pourraient basculer vers des régimes moins ouverts.

En tant que « Millennials », il est pertinent de s’interroger sur son propre rapport à la démocratie : comment réconcilier les attentes citoyennes avec les réalités politiques ? Comment revitaliser l’engagement démocratique face à la tentation du cynisme ou de l’autoritarisme ?

Synthèse en diagramme flowchart

[Diagramme]

En conclusion, l’article The democratic disconnect met en lumière une crise démocratique profonde, marquée par une fracture générationnelle et une perte de confiance dans les institutions. Cette situation appelle à une réflexion urgente sur les moyens de renforcer la démocratie et de reconnecter les citoyens, en particulier les jeunes, avec les valeurs démocratiques fondamentales @docHU01-002-G PPT3 Récapitulatif The Democratic Disconnect.pdf.