CM 6

Histoire contemporaine29 novembre 2025
S'entraîner avec cette fiche
Fais tes flashcards, tes quiz, ton examen blanc

Fonctionnalités avancées disponibles dans l'application

  • Images
  • Formules mathématiques
  • Diagrammes avec rendu pro et scolaire sur l'app
Commencer gratuitement

Faveurs, défaveurs et persécutions sous Vichy (1940 – 1944)

Le régime de Vichy, dirigé par le maréchal Pétain entre 1940 et 1944, est marqué par une politique de persécutions et de faveurs ciblées, notamment à l’encontre des juifs, des francs-maçons, des libres penseurs, ainsi que par un traitement différencié des Églises protestantes et catholiques. Cette période est caractérisée par une collaboration active avec l’Allemagne nazie, notamment dans la persécution des juifs, mais aussi par des réactions diverses des différentes composantes de la société française.


I. La persécution des juifs

L’antisémitisme du régime de Vichy s’inspire largement de la conception de Charles Maurras, qui considère les juifs comme un facteur de désintégration nationale et un danger pour la France. Ce rejet ne provient pas de l’Allemagne, mais est une politique propre à Vichy, fondée sur l’idée que les juifs cherchent à dominer la France par l’argent, le spectacle ou la culture. Le régime lance ainsi une politique antijuive accompagnée d’une propagande spécifique, avec des conférences sur les prétendus périls juifs et plusieurs mesures discriminatoires.

La première mesure antijuive est prise dès le 22 juillet 1940 : une commission de naturalisation retire la nationalité française à 15 000 personnes, dont 40 % sont juifs.

  • Le 27 août 1940, Vichy abroge le décret Marchandeau, qui protégeait les juifs contre l’incitation à la haine, supprimant ainsi une protection juridique importante.

Le 3 octobre 1940, le régime promulgue un statut des juifs qui rompt avec l’égalité juridique traditionnelle.

  • Ce statut définit la judéité sur des critères généalogiques (trois grands-parents juifs, ou deux parents et un conjoint juif)
  • Il n’est pas basé sur la religion.
  • Il interdit aux juifs l’accès à de nombreux métiers, notamment dans la haute fonction publique, l’armée, la magistrature, l’enseignement, et les fonctions électives.

Le 4 octobre 1940, un texte autorise l’internement des juifs étrangers.

  • Le 29 mars 1941, un commissariat général aux questions juives est créé pour appliquer cette politique discriminatoire, dirigé par Xavier Varrat, connu pour ses positions antisémites.
  • Le 2 juin 1941, un nouveau statut des juifs étend les professions interdites, impose un recensement des biens juifs et plonge les familles juives dans la précarité.

L’opinion publique ne manifeste pas d’opposition notable à ces mesures, à l’exception du pasteur Marc Boegner, qui désapprouve dès décembre 1940.

  • Aucun évêque ne s’oppose publiquement à la politique antijuive de 1940-1941.

En zone occupée, l’Allemagne impose des mesures antijuives plus visibles, comme l’obligation d’afficher « magasin juif » sur les commerces juifs dès 1940, puis le port de l’étoile jaune en 1942, provoquant un mécontentement parmi les non-juifs.

À l’été 1942, Vichy collabore activement à la déportation des juifs, sous la direction de Pierre Laval.

  • La rafle du Vélodrome d’Hiver en juillet 1942, organisée par la police française, arrête des milliers de juifs pour leur déportation.
  • Vichy livre aussi des juifs de la zone non occupée.
  • Environ un quart des juifs de France sont déportés, avec un taux de mortalité de 95 %.
  • Certains juifs sont cependant protégés par des civils dans certains lieux.

Le régime de Vichy ne vise pas explicitement l’extermination, mais mène une politique d’exclusion, de spoliation et de persécution qui conduit à la misère des juifs et à leur déportation à partir de 1942.


II. Les forces anticléricales

Les francs-maçons sont une cible privilégiée du régime, considéré comme une puissance occulte contrôlant la Troisième République avec les juifs (complot judéo-maçonnique).

  • Cette vision est partagée par des dignitaires comme Philippe Henriot.
  • Une politique anti-maçonnique est mise en œuvre, avec un service des sociétés secrètes dirigé par Bernard Faÿ chargé d’identifier et de ficher les francs-maçons.

Le 13 août 1940, une loi dissout les sociétés secrètes maçonniques, et les fonctionnaires doivent déclarer ne pas appartenir à la franc-maçonnerie.

  • Le 11 août 1941, les noms des anciens dignitaires maçonniques sont publiés au Journal Officiel.

Les libres penseurs sont également visés.

  • Dès octobre 1940, leurs activités sont interdites, et leurs publications ne peuvent plus être diffusées.
  • En 1941, une loi sur le statut métallique permet de récupérer la fonte des statues symboliques des Lumières et de la Troisième République, comme celles d’Émile Zola, Victor Hugo, et Maria Deraismes, première femme initiée à la franc-maçonnerie et libre penseuse féministe.

III. En marge des préoccupations du régime : les Églises protestantes

Au début de l’occupation, Pétain n’a pas de politique spécifique envers les protestants, qui cherchent à se rapprocher du régime pour se protéger des milieux anti-protestants.

  • Le pasteur Marc Boegner se rend à Vichy pour défendre les mouvements protestants, notamment les mouvements de jeunesse.

Cependant, la confiance envers Pétain est de courte durée.

  • La culture républicaine forte chez les protestants explique leur détachement précoce du régime.
  • Ils perçoivent les faveurs accordées à l’Église catholique comme illégitimes, ce qui les pousse à rejoindre la Résistance rapidement.

Plusieurs figures protestantes s’engagent dans la Résistance, comme :

  • Berty Albrecht, cofondatrice du mouvement Combat avec le catholique Henri Frenay, militante féministe et anti-fasciste hostile à la Révolution nationale.
  • André Chamson, écrivain protestant, rejoint le CVIA dans les années 1930.
  • Freddy Durrleman s’engage aussi dans la Résistance, est arrêté par la Gestapo et emprisonné.

La persécution des juifs est un sujet de fracture avec le régime.

  • Dès décembre 1940, le pasteur Boegner écrit à Pétain pour désapprouver la politique antijuive.
  • En 1941, il s’adresse au grand rabbin de France.
  • En 1942, les pasteurs sont invités à lire une lettre dénonçant le sort des juifs.

En 1939, la CIMADE (Comité Inter-Mouvement auprès des Évacués) est créée par les mouvements de jeunesse protestants pour venir en aide aux Alsaciens, puis aux juifs et étrangers internés dans les camps de Vichy.

  • Leur rôle est officiellement reconnu par les autorités.

Le village de Chambon-sur-Lignon, sous la conduite du pasteur André Tocmé et de son épouse Magda, organise l’accueil clandestin d’enfants juifs, sauvant de nombreuses vies.

  • Le souvenir de la fin de l’édit de Nantes en 1685 résonne dans la conscience protestante face à la persécution juive.

IV. Retour en grâce de l’Église catholique

Le régime de Vichy prône un retour aux valeurs traditionnelles :

  • autorité du chef, famille, corporations, artisanat,
  • rejetant la décadence supposée de la Troisième République.
  • Cette vision nationaliste et paternaliste s’accorde avec l’Église catholique, qui retrouve une place privilégiée.

Les communistes et socialistes sont aussi des boucs émissaires du régime. Certains catholiques prennent cependant leurs distances et entrent en Résistance.

En 1941, paraît clandestinement le premier numéro des Cahiers du Témoignage chrétien, dirigé par le jésuite Pierre Chaillet.

  • À la fin de la guerre, 216 prêtres catholiques engagés dans la Résistance ou la clandestinité sont morts en captivité ou déportation.

Symboliquement, le protocole d’avant la séparation des Églises et de l’État est rétabli, avec la présence du préfet au sacre des évêques. Matériellement, la faveur principale est l’octroi de subventions aux écoles catholiques.

En 1941, les communes peuvent financer les écoles privées, et beaucoup le font. De 1940 à 1941, avant les déportations, les autorités catholiques ne s’opposent pas à la politique antisémite, adhérant à l’idée d’un « problème juif » exprimée par l’épiscopat et Vichy.

  • La doctrine catholique est celle du double protectorat : protéger les juifs de la vengeance chrétienne, et protéger les chrétiens de l’influence juive.

Les rafles de 1942 changent la donne.

  • L’archevêque de Toulouse, Monseigneur Saliège, prend connaissance des atrocités dans les camps proches et, le 23 août 1942, fait lire dans toutes les paroisses une lettre dénonçant ces faits, utilisant explicitement le mot « juif ».
  • L’évêque de Montauban, Monseigneur Théas, fait de même.
  • Ces protestations épiscopales restent minoritaires, au nombre de six en 1942.

Synthèse des persécutions et résistances sous Vichy

[Diagramme]


Cette analyse montre que le régime de Vichy a mené une politique antisémite autonome, avec des mesures précoces et sévères, une collaboration active à la déportation, tout en persécutant d’autres groupes comme les francs-maçons et les libres penseurs. Les protestants, bien que peu concernés directement, se sont rapidement opposés au régime et ont participé à la Résistance. L’Église catholique, après un silence initial, a vu un retour de ses privilèges, mais aussi des prises de position courageuses de certains évêques face aux persécutions.

Cette complexité des faveurs, défaveurs et persécutions sous Vichy illustre les tensions profondes dans la société française durant cette période troublée @docCM6.docx.

Agent CTA Background

Transformez votre façon d'apprendre

Commencer maintenantRejoignez des milliers d'étudiants qui ont déjà transformé leur apprentissage