La démocratie, système politique fondé sur la souveraineté populaire, est aujourd’hui confrontée à une crise majeure qui questionne son fonctionnement et sa pérennité. Cette crise s’inscrit dans une perspective historique longue, marquée par des phases d’expansion et de régression, et s’accompagne de débats sur la nature même de la démocratie contemporaine, notamment autour du concept de démocratie libérale.

Perspective historique et évolution récente

Depuis les années 1950-60, la décolonisation a favorisé l’émergence de nombreux États souverains cherchant à instaurer des régimes démocratiques. Cette dynamique s’est amplifiée dans les années 1970-80 avec la « troisième vague de démocratisation » identifiée par Samuel Huntington, qui a vu plus de 30 nouvelles démocraties apparaître, notamment en Grèce, au Portugal, en Espagne, au Brésil, en Corée du Sud et à Taïwan. Après 1989, la chute du Mur de Berlin a permis la démocratisation des anciens États communistes, élargissant encore le nombre de régimes démocratiques dans le monde.

Cependant, depuis 2006-2007, un paradoxe s’est installé : malgré un désir persistant de démocratie dans certains pays comme le Bélarus ou la Birmanie, on observe une régression démocratique globale. Larry Diamond souligne que « il y a un enracinement de l'autoritarisme dans les non-démocraties, et un déclin dans le fonctionnement et la confiance en soi au sein des démocraties les plus établies et les plus riches » (Larry Diamond, Journal of Democracy, 2015) . Paradoxalement, le label « démocratique » demeure un signe de qualité politique, si bien que même des régimes autoritaires organisent des pseudo-élections pour se légitimer.

Le concept de démocratie libérale

La démocratie libérale est un système politique où les libertés individuelles et collectives sont protégées, et où la société civile dispose d’espaces autonomes par rapport au pouvoir étatique. Larry Diamond la définit comme « un système politique dans lequel les libertés des individus et des groupes sont bien protégées et dans lequel il existe des sphères de société civile et de vie privée isolées du pouvoir étatique » .

Le libéralisme, à la différence de la démocratie qui répond à la question « qui gouverne ? », s’intéresse à la limitation du pouvoir des gouvernants. Cette limitation est assurée par un État de droit, fondé sur une constitution garantissant les droits fondamentaux. Les présupposés normatifs de la démocratie libérale incluent la responsabilité des gouvernants devant les gouvernés, la liberté d’expression, d’association, la protection contre la violence politique, l’arrestation arbitraire ou la torture. Ainsi, « la démocratie c’est d’abord la protection des individus et des groupes » .

Illibéralisme et déclin démocratique

Toutefois, la démocratie électorale ne garantit pas nécessairement les libertés libérales. Historiquement, certaines démocraties prémodernes, comme Athènes, n’étaient pas libérales, tandis que certaines monarchies constitutionnelles du XIXe siècle, comme l’Empire des Habsbourg, étaient libérales mais non démocratiques. Aujourd’hui, certaines démocraties deviennent illibérales en affaiblissant les contre-pouvoirs, en contrôlant le pouvoir judiciaire, en limitant la liberté des médias et de la société civile, ou en restreignant les droits des minorités au nom de la sécurité ou de la foi .

Ce déclin démocratique se manifeste par plusieurs phénomènes analysés par des chercheurs comme Larry Diamond, Nancy Bermeo, Steven Levitsky et Daniel Ziblatt. Larry Diamond parle de « régression démocratique », caractérisée par une baisse de la participation électorale, un dysfonctionnement gouvernemental, une perte de confiance dans les institutions et un fossé grandissant entre élites et électeurs. Nancy Bermeo décrit un « reflux démocratique » où les institutions sont affaiblies ou éliminées par le pouvoir exécutif, tandis que Levitsky et Ziblatt évoquent une « démocratie subvertie » où les institutions sont fragilisées subtilement par la confiscation des arbitres (justice, médias), l’intimidation des opposants et la modification des règles électorales et constitutionnelles .

La démocratie comme processus perfectible

Il est important de souligner que la démocratie parfaite n’existe pas. Toutes les démocraties, même les plus consolidées, font face à des défis tels que la corruption, le favoritisme, l’inégalité d’accès au pouvoir ou l’apathie électorale. Juan Linz rappelle que « la démocratie politique ne garantit pas forcément ne serait-ce qu'une approximation raisonnable de ce que l'on appelle une société démocratique avec toutes sortes d'opportunités dans tous les domaines ». De même, Philippe Schmitter et Terry Lynn Karl notent que « les démocraties ne sont pas nécessairement plus efficaces économiquement ou administrativement, ou plus ordonnées et gouvernables que les régimes autocratiques » .

La démocratie doit donc être comprise comme un processus en constante amélioration, visant à être plus juste, plus inclusive et plus démocratique. Cette dynamique implique une vigilance constante pour protéger les libertés, renforcer les institutions et encourager la participation citoyenne.

Synthèse schématique : La démocratie aujourd’hui

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En conclusion, la démocratie contemporaine est à la fois un héritage historique, un système normatif fondé sur la liberté et l’État de droit, et un processus dynamique confronté à des défis majeurs. Sa crise actuelle appelle à une réflexion approfondie sur la manière de préserver ses acquis tout en la rendant plus inclusive et résiliente face aux menaces illibérales @docHU01-002-G PPT2 La démocratie aujourdhui.pdf.